jeudi, septembre 28, 2000

Stoecklin le virtuose

Daniel Costantini dit de lui qu'il est plus doué que Richardson. Pas un mince éloge lorsque l'on sait la propension de l'ancien entraîneur tricolore à... ne pas donner dans le compliment, lorsque l'on sait, aussi, l'estime dans laquelle il porte Jackson lui-même.

Mais s'il est un qualificatif qui va effectivement comme un gant à Stéphane Stoecklin, c'est bien celui-là: doué. Stoeck, c'est la classe à l'état pur, la puissance de feu d'un petit porte avion. Un bras gauche magique, un coup de poignet dévastateur. Un tir d'une limpidité cristalline et d'une précision chirurgicale.

Élève de l'Alsacien Rudy Bertsch à Chambéry (une référence), Stéphane Stoecklin a connu une ascension vertigineuse, à l'image du talent caractérisant le bonhomme. Il fut, avec Richardson, le premier de l'équipe de France espoirs génération 69 (Wiltberger, Schaaf, Cochard, Hoffer ou Delattre) appelé par Daniel Costantini en France A. C'était à l'occasion des Mondiaux disputés en ex-Tchécoslovaquie qui allaient permettre à la formation tricolore de gagner son billet pour les Jeux Olympiques de Barcelone. Grâce à un succès remporté un dimanche matin (coup d'envoi à... 9 heures) face à l'Islande.

Le Berjalien n'allait plus quitter le groupe France jusqu'à un autre beau matin, un matin égyptien, neuf ans plus tard. "Stéphane Stoecklin, 1990-1999. Paix à son bras gauche"...

Durant neuf ans, Stéphane Stoecklin a ainsi pris part aux plus belles campagnes de l'équipe de France, celles qui, de Prague à Reykjavik en passant par Barcelone, Kumamoto et Stockholm, permirent au handball français, en même temps qu'à son bras séculier, d'atteindre les plus hauts sommets.

Meilleur joueur du monde en 1997, meilleur buteur de la difficile Bundesliga la même année (il évoluait à Minden), Stéphane Stoecklin a marqué de son empreinte cette période bénie. Plus discrètement que d'autres, moins médiatiquement que certains peut-être, mais avec une efficacité diabolique. Marquant des buts comme d'autres enfilent des perles, avec une insolente facilité. Et inventant sans cesse de nouveaux tirs, des gestes venus de nulle part. Ne pouvant venir que de lui...

Stéphane Stoecklin, c'est tout ça: le talent, cette aptitude à hisser son niveau de jeu à hauteur de sommets inconnus, la force et l'intelligence. La classe quoi. Mais c'est aussi un type hors norme. Un ami sûr, un complice fidèle. Un garçon attachant, bien sous tous rapports.

Pas vraiment Barjot, il a su s'adapter. Et se faire adopter, pas une mince performance, par les Volle, Gardent, Munier ou Lathoud, garants de l'esprit animant le groupe France dans les années 90. Il a su se faire aimer par tous et partout. Impossible de ne pas apprécier ce garçon au regard franc ne manquant ni d'humour ni de répartie. Difficile de ne pas succomber au charme de cet esthète, de cet homme au rire si communicatif et au caractère si affirmé.

Yannick Noah a dit un jour que le sport n'est qu'un moyen détourné employé par les hommes pour se dire qu'ils s'aiment. Stéphane Stoecklin a, dans ce cas, usé et abusé du sport. Et continue d'en abuser, demandez à tous ces Japonais qui vouent, aujourd'hui, une admiration sans borne pour notre Stéphane, leur Stoecklin-san...