mercredi, février 08, 2006

La langue de bois du médiateur

Voici la réponse officielle du médiateur de france télévision à l'affaire de la non retransmission de la finale de l'euro 2006

Vous avez été nombreux à nous faire part de votre déception ou de votre incompréhension après la non-diffusion par France Télévisions de la finale du championnat d'Europe de handball qui opposait, dimanche 5 février à Zurich, la France à l'Espagne.


Comme vous le savez, France Télévisions n'est pas détentrice des droits de diffusion de cette compétition, lesquels ont été concédés par la Fédération Européenne de handball à la chaîne cryptée Canal +. Néanmoins, le match de dimanche entrait dans la liste des "événements majeurs" tels que les définit le décret du 22 décembre 2004 qui établit les conditions de retransmission, par les chaînes de télévision, des événements sportifs de première importance. Les dispositions de ce décret ont précisément pour objet de faire en sorte qu'une partie importante du public ne soit pas privée de la possibilité de suivre ces événements sur un service de télévision à accès libre.


Aux termes de ce texte, le détenteur exclusif des droits (Canal +, en l'occurence), s'il ne peut lui-même assurer cette retransmission en clair, est dans l'obligation légale de proposer, "selon des termes et conditions de marché équitables, raisonnables et non discriminatoires" les droits de diffusion de l'événement à des chaînes hertziennes en clair reçues par au moins 85% des foyers. Si, en réponse à cette proposition, le détenteur des droits ne reçoit aucune offre, ou n'en obtient aucune qui réponde aux conditions précitées, il est libéré de l'obligation fixée par le décret et peut exercer lui-même ses droits de diffusion (y compris en crypté).


C'est précisément - et malheureusement - ce qui est arrivé à l'issue des contacts engagés voici 15 jours entre France Télévisions et Canal +. Cette dernière a adressé à France Télévisions une proposition d'un montant de 400 000 euros minimum, non négociable. France Télévisions a jugé que ce tarif ne correspondait pas au prix du marché ; il faut noter, par ailleurs, qu'aucun autre diffuseur en clair (TF1, par exemple) auquel cette même proposition avait pourtant été faite, n'y a donné suite. Comme vous le voyez, cet épisode met en exergue, outre les problèmes générés par une relation commerciale entre les diffuseurs, la latitude d'interprétation du texte du décret - celui-ci échouant à l'évidence à empêcher, alors que c'était précisément son but, que soit privée du spectacle d'une compétition majeure une majorité des téléspectateurs.

La collecte de la redevance, qui étaie la colère exprimée par nombre de vos messsages, permet à France Télévisions de proposer à ses téléspectateurs, entre autres, tout au long de l'année et de façon exclusive, un nombre considérable d'événements sportifs de tout premier plan (Internationaux de Roland Garros, Tournoi des VI nations, Tour de France, Jeux olympiques d'été et d'hiver, Coupe de la Ligue de football...) ; reste que la capacité pour France 2 ou France 3 chaînes publiques et généralistes, de proposer en plus à ses téléspectateurs des événements sportifs comme la finale de dimanche, est malheureusement tributaire des aléas d'un marché des droits sportifs hyper-concurrentiel et en inflation constante.

Soyez assuré que nous le regrettons aussi vivement que vous, et qu'en aucun cas cet épisode ne doit être interprété comme la marque d'une indifférence de France Télévisions à l'égard du handball et des amateurs ou pratiquants de ce sport.

Quant à la diffusion dans la nuit de dimanche à lundi sur France 2 du Superbowl, dont certains de vos courriels estiment l'intérêt mineur par rapport au handball et demandent combien elle a coûté à la chaîne, nous pouvons sans ambages vous assurer qu'elle représente un engagement budgétaire sans aucune commune mesure avec les 400 000 euros requis pour la diffusion de la finale de handball.

Nous espérons que cette réponse, faute d'apaiser votre déception, vous permettra d'appréhender les contraintes particulières avec lesquelles les chaînes publiques doivent composer.


Vos nombreuses protestations ont bien entendu été relayées auprès de la direction des sports de France Télévisions, qui en a pris connaissance avec la plus grande attention.

Merci de vous être donné la peine de nous faire part de votre sentiment,

Salutations attentives,


Alain Le Garrec


Médiateur des programmes